UN PROJET ROUTIER DANS L'AUTUNOIS AU 18e S.  

UN PROJET ROUTIER AU 18e SIÈCLE :

 

D’AUTUN À TOULON-SUR-ARROUX PAR MESVRES

 

 

1. INTRODUCTION

 

1.1. Présentation du sujet

 

Le fonds des États de Bourgogne aux Archives départementales de la Côte-d’Or conserve de nombreux dossiers relatifs à la politique routière de la province, de la fin du 18e siècle à la Révolution. Parmi ces derniers, l’un concerne la construction de la route d’Autun à Toulon-sur-Arroux qui apparaîtra finalement dans le programme routier de 1784 comme un tronçon de l’itinéraire n° 16 de la Généralité de Champagne à la Généralité de Lyon par Châtillon-sur-Seine, Semur-en-Auxois, Saulieu, Autun, Digoin et Marcigny. [A.D.C.O. C 3861]

 

Deux cartes accompagnent cette étude : pour les consulter, cliquer ici pour la zone Nord d'Autun à Mesvres, ou ici pour la zone sud de La Chapelle-sous-Uchon à Toulon.

 

1.2 Les ingénieurs des Ponts et Chaussées des États de Bourgogne

 

Comme l’a bien démontré P. de Saint-Jacob dans ses magistrales études sur l’Ancien Régime, la seconde moitié du 18siècle est animée par une montée en puissance financière et technique de la politique routière des États de Bourgogne, qui en ont obtenu la prérogative par arrêt du Conseil du Roi depuis 1651.

En 1756, le Bureau des Ponts et Chaussées des États de Bourgogne est dirigé par l’ingénieur en chef Thomas Dumorey, quand le sous-ingénieur Charles-Joseph Le Jolivet se voit confier l’étude de la nouvelle liaison routière entre Étang-sur-Arroux et Toulon, assisté du sieur Le Fauste, commis des Ponts et Chaussées du Bourbonnais, car la route doit empiéter sur cette Généralité.

En 1758, une réorganisation du service voit arriver dans le Département du Sud de la Bourgogne un ingénieur promis à un bel avenir, Émiland Gauthey. Deux ans plus tard, lui est confié le projet d’une route d’Autun à Toulon qui va devenir l’un des chantiers routiers de la décennie dans la région, avec l’achèvement d’une autre route neuve, de Saulieu à Chalon par Autun et Couches. Gauthey succèdera à Thomas Dumorey en 1782, après avoir dirigé la construction d’une grande partie du nouveau réseau routier et de nombreux ponts remarquables (Navilly, Chalon, Gueugnon, Blanzy, etc.) ; les études et la réalisation du canal du Centre couronneront sa carrière en Bourgogne qu’il quitte en 1792 pour un poste d’inspecteur général des Ponts et Chaussées à Paris.

 

1.3 Un projet routier ambitieux

 

La route d’Autun à Toulon, au moment où elle commence à être étudiée, fait-elle déjà partie d’un projet plus ambitieux ? En effet, les ingénieurs des États de Bourgogne proposeront, autour de 1770, d’en faire une section de l’axe Paris-Lyon susceptible de concurrencer l’itinéraire du Bourbonnais par Nevers et Moulins (future N 7) : Dumorey imagine de prolonger la route Saulieu-Autun-Toulon vers Marcigny et Roanne ; Gauthey, qui n’ignore sans doute pas que la ligne droite de Paris à Lyon passe par Charolles, suggère un prolongement vers Charolles, La Clayette et le col des Écharmeaux. Les États de Bourgogne n’ayant pas cru devoir donner suite à ce dernier projet, l’attention s’est alors concentrée sur une « simple » liaison Autun-Roanne en prolongeant les tronçons progressivement réalisés entre Saulieu et Digoin de 1760 à 1765. La route de Toulon à Charolles prolongée vers La Clayette devra attendre et figurera dans le programme routier des Etats en 1784 [A.D.C.O. C 3861] comme route n° 44 de Toulon à Charlieu.

Enfin, la construction de la route vers Toulon s’inscrit dans un schéma routier qui tend à recréer autour de la ville d’Autun, en ce troisième quart du 18e siècle, quelques branches de l’étoile routière de ses origines éduennes : les transversales Autun-Beaune par Nolay, Autun-Dijon par Arnay-le-Duc et Autun-Moulins par Luzy viennent y croiser la nouvelle route postale de Paris à Lyon, établie en 1775, entre Saulieu et Chalon.

 

2. LES LIAISONS ROUTIÈRES D’AUTUN À TOULON JUSQU’AU 18SIÈCLE

 

2.1 La voie antique et la station de Telonno

 

Bien qu’ayant laissé assez peu de vestiges apparents au sol ou repérés en prospection aérienne, l’existence d’une voie antique entre Autun et Digoin est généralement admise par les archéologues qui identifient Toulon avec la station de Telonno signalée par la Table de Peutinger. Les notes laissées par les archéologues du 19e siècle [Archives de la Société Éduenne] permettent de reconstituer le tracé approximatif de cette voie qui sortait d’Autun par la porte Saint-Andoche : les flancs sud de la montagne d’Ornez, Le Pignon Blanc, Le Péage de Laizy et le site de La Perrière, près d’un ancien gué de l’Arroux, en constituaient les jalons jusqu’à Étang ; au-delà, elle a été repérée au Vernois, à Parpannat (près de Saint-Nizier-sur-Arroux), entre Plaige et La Boulaye en prospection aérienne [M. Maertens, 1991] ; elle est encore signalée sur le plan cadastral napoléonien de La Tagnière (1830) entre Bel-Air et La Planche. Entre Toulon et Digoin, les prospections aériennes la signalent dans la région de Gueugnon [J.C. Notet, 2006]. Au-delà de Digoin enfin, elle peut plausiblement être prolongée vers Roanne et Feurs. Par ailleurs, Toulon qui apparaît aux yeux de certains archéologues comme un carrefour antique, pourrait aussi jalonner un vieil itinéraire de Bibracte à la Saône par Charolles et La Clayette, que Gauthey aurait donc eu l’idée de ressusciter au 18e siècle [E. Thévenot, 1969].

 

2.3. Le chemin médiéval de Mesvres à Toulon

 

Bien repéré par R. Niaux [R. Niaux, 2000], qui le prolonge au nord vers Charmasse, ce chemin apparaît topographiquement intermédiaire, comme voie de pied de mont, entre le précédent qui suit à distance variable le cours de l’Arroux, et la route du 18e siècle établie dans les collines. Lui aussi est mentionné par certains cadastres napoléoniens et dans quelques terriers locaux : Toulongeon, (1773), La Boulaye (1533). Moins bien conservé que le chemin précédent, ses principaux jalons à partir de Mesvres sont Les Mouillons, La Chazée, Bussière, Corfeuil, Lavault, La Croix. Mais son étape la plus significative est sans doute la maison hospitalière dite des Quatre Frères, aux Rendards (commune de Dettey), située à la croisée du chemin de Mesvres à Toulon avec un chemin de Montcenis à Charbonnat (à prolonger vers Luzy). Son existence est attestée au 14e siècle [A. de Charmasse, 1878]. Une chapelle dépendant de cette « Maison-Dieu » est mentionnée dans un inventaire des chapelles rurales au 18e siècle [A.D.S.L. G 438] ; il lui est entre autres attribué comme confins « le chemin de Maivre à Toulon ». Une motte féodale (Bussière) jalonne encore cet itinéraire qu’on peut considérer comme médiéval.

 

2.2 L’ancien chemin d’Autun à Toulon par Étang-sur-Arroux

 

Les cartes de Delisle (1709) et de Seguin (1763) montrent le chemin encore en usage au 18e siècle par la rive gauche de l’Arroux, à distance variable de la rivière. En fait, le tracé présumé de la voie antique devait être assez peu éloigné, entre Étang et Toulon notamment, de cet ancien chemin par ailleurs signalé sur les plans du cadastre napoléonien des communes du val d’Arroux. Ce dernier est encore largement emprunté au 18e siècle, ainsi qu’en témoigne l’enquête de 1757 réalisée auprès des curés pour renseigner la carte de Cassini. Le curé des paroisses Saint-Jean-de-la-Grotte et Saint-Pancrace écrit : « [Le faubourg Talus] est au couchant de la ville d’Autun ; il est coupé dans sa longueur de l’orient au couchant par le chemin qui conduit d’Autun à Toulon en Charollois ; ce chemin, quoique le principal chemin d’Autun à Toulon, est cependant très mauvais et n’est pas pavé. » Le curé de Brion écrit : « Le grand chemin d’Autun à Toulon traverse ma paroisse du côté de bize en venant d’Autun. ». Autre notation du curé d’Étang : « L’ancien château de la Perrière, situé sur le grand chemin d’Autun à Toulon sur Arroux, à un demi quart de lieue de mon clocher est entièrement ruiné. » ; il ne manque pas de faire remarquer que le pont de pierre sur le Mesvrin « commence à dépérir ». Le curé de Saint-Nizier-sur-Arroux précise que « le grand chemin d’Autun à Toulon est en très mauvais état, il cotoie ma paroisse éloigné de mon village d’un quart de lieue. » Enfin, le curé de La Boulaye situe le chemin avec une grande précision topographique : « Le chemin d’Autun à Toulon traverse comme la rivière le territoire de la paroisse du nord quart de nord-ouest dudit clocher, à son sud quart au sud-ouest. Le chemin et la rivière se cottoyent à deux cents pas l’un de l’autre du nord au sud de la paroisse. »

Cet itinéraire d’Autun à Toulon par la vallée de l’Arroux franchissait les ruisseaux affluents de l’Arroux à la faveur de nombreuses chaussées d’étangs dont certaines sont encore en place (étangs ou anciens étangs du Vernoy, de La Planche, du Livier, de Parpannat, de Cane, de Petit Lait, etc.). Ce chemin, effacé sur certaines sections, recoupe la route actuelle (D 994) à plusieurs reprises, notamment à La Planche, dans la double courbe des Forêts, au Rivet, à La Sourdelle. Sa mention dans un terrier du château de La Boulaye (1533) et la présence de mottes féodales (Parpannat, Bois des Mouilles, La Boulaye, La Roche Bazot) autorisent à lui présumer un usage médiéval.

 

2.4 Le chemin d’Autun à Toulon par Mesvres et La Chapelle-sous-Uchon

 

Il n’en demeure pas moins qu’il existait conjointement à ces itinéraires des chemins reliant Autun à Mesvres par Montjeu, et Mesvres à La Tagnière par La Chapelle. En 1757, voici la description que le curé de la paroisse Notre-Dame donne du chemin de Mesvres sur le plateau de Montjeu : « Sur la même montagne à une demie lieue d’Autun, et sur le chemin qui va de ladite ville à Mayvre du côté du couchant et proche le mur dudit parc, il y a deux domaines ; l’un apellé la Chaume et l’autre les Garniers entourés de bois, à la réserve de celui de la Chaume où il n’y en a point du côté du levant. » Le curé de la Chapelle-sous-Uchon déclare que « le chemin d’Autun à Toulon passe par [sa] paroisse, l’on s’en sert souvent et surtout dans le temps des eaux ; il conduit à Charolles, à Paray, etc. C’est la route ordinaire des Auvergnats et des Limousins. »

 

3. L’AVANT-PROJET (1756-1760)

 

3.1 Tracés reconnus par l’ingénieur Le Jolivet

 

Afin d’économiser la construction d’un tracé entièrement nouveau, on a d’abord envisagé de brancher sur la route d’Autun à Bourbon-Lancy (actuelle D 981) un raccordement vers Toulon, soit à partir du relais de poste de Maison de Bourgogne (4 lieues et demie) soit à partir de la colline dite la Ranche des Châtaigniers (4 lieues) : le premier tracé suivrait le pied des collines par Thil-sur-Arroux, comme le fera plus tard la D 114 ; le second emprunterait la crête du petit massif du mont Dône, déjà parcouru par la vieille piste dite « des Foires du Beuvray » et servant d’appui à la limite interdépartementale Saône-et-Loire/Nièvre.

Par délibération du 12  janvier 1759, le tracé « faîtral » est arrêté par les Élus généraux des États de Bourgogne. Observons toutefois que les ingénieurs avaient noté que la distance Autun-Toulon compterait alors 9 lieues, soit deux de plus qu’en « suivant les routtes ordinaires sur l’autre côté de l’Arroux [par Étang et Mesvres], entièrement à faire à neuf dans un pays difficile. »

 

3.2. Opposition au projet de Le Jolivet

 

La principale opposition vient des habitants de Toulon, rapportée par Dumorey dans son mémoire de 1764 : « Leurs motifs étoient qu’on ne pouvoit aller dans un jour d’Autun à Toulon attendu que les voitures du pays étoient attelées à des bœufs. » De plus, est dénoncé le fait que l’itinéraire proposé, plus long que le chemin par Etang, traverse « une chaîne de hautes montagnes presque désertes sans desservir aucuns village. » [Les crêtes de Dône]

M. de Varenne, Commissaire aux Chemins des États de Bourgogne ayant suspendu « le tracement jusqu’à plus ample éclaircissement », l’ingénieur Gauthey est alors chargé en 1760 d’étudier à nouveau la question.

 

 

4. PROJETS ET MÉMOIRES DE L’INGÉNIEUR GAUTHEY

 

4.1 Reconnaissance des lieux et premier rapport Gauthey (25 novembre 1761)

 

Gauthey commence par émettre un avis sur l’avant-projet de son prédécesseur, confirmant que c’est l’itinéraire le moins dispendieux, et « infiniment meilleur en passant sur la crête des montagnes que par la plaine de Thil sur Arroux ». En même temps, il en souligne les inconvénients : la longueur excédant la distance parcourable en un jour avec des bœufs, absence de village (donc d’étape possible), difficulté aussi pour raccorder les villages avoisinants.

Pour rester sur le même versant du val d’Arroux, Gauthey étudie encore la possibilité d’emprunter la route de Bourbon jusqu’à Fontaine-la Mère, puis projette un tracé par Savilly (chaussée d’étang), Saint-Didier, Thil et Montmort : itinéraire ex-nihilo qui présente l’inconvénient de traverser beaucoup de ruisseaux.

Mais surtout l’attention de Gauthey se porte sur l’autre versant de la vallée : « Les montagnes et les roches […] avoyent fait imaginer que l’on ne pouvoit que très difficilement les tourner, et celle de Montjeu […] étant fort rapide l’on avoit pas songé à visiter les autres. » Il étudie donc l’itinéraire le plus proche de la ligne droite par Montjeu, Mesvres, La Chapelle-sous-Uchon et Aisy. Après avoir considéré une suite éventuelle par Dettey, il « trouva des montagnes si rapides qu’il reconnut qu’il étoit impossible d’établir un chemin par ce passage. ». En conséquence, il propose de reprendre un tracé proche du chemin médiéval de Mesvres à Toulon par Les Rendards, Montfeurton, Le Rivet et La Boulaye.

En vérité, le mémoire de Dumorey (1764), qui ne manque pas de souligner que Gauthey a parcouru au moins 40 lieues pour établir un chemin qui n’en compte que 7, reconnaîtra que son adjoint a négligé la reconnaissance du chemin d’Étang à Toulon « qui l’écartoit de la ligne droite ».

 

4.2. Argumentation et décision des Élus (18 janvier 1762)

 

D’emblée le choix semble se restreindre aux tracés les moins longs. Les arguments qui vont désormais alimenter la délibération des Élus généraux en faveur de l’itinéraire par Mesvres, sont parfaitement résumés dans le mémoire de Dumorey et peuvent se ramener à trois principes :

Éviter les zones inondables, notamment la plaine d’Étang soumise aux crues du confluent du Mesvrin et de l’Arroux. « Sur le chemin qui passoit par Étang, il faudroit des ponts pour recevoir les eaux sur une superficie d’environ 9 lieues carrées ce qui fait près du sextuple de l’autre côté. » [par Mesvres]. Si les voyageurs préfèrent actuellement passer par Étang, c’est que l’autre itinéraire par les collines est impraticable, « mais le sieur Gauthey voyoit qu’il étoit assés facile d’y établir un bon chemin sur des pentes douces, en graduant les montagnes comme il l’a fait le niveau à la main. »

Desservir les villages. La route par Étang ne traverse aucun village important (le bourg d’Étang est même sur l’autre rive) au contraire de la route par Mesvres et La Chapelle, « ce qui parut plus avantageux non seulement pour le pays mais encore pour la sûreté et la commodité des voyageurs. »

Recours à la corvée. Toutes les communautés de la rive gauche de l’Arroux travaillant sur le chemin d’Autun à Bourbon, on ne pourrait que faire appel aux communautés disponibles d’autre part et plus ou moins éloignées : Broye, Mesvres, Uchon, La Tagnière, la Chapelle, Marmagne, Saint-Symphorien, Charmoy…

Ayant donc considéré la route « la plus aisée à construire et la plus avantageuse au commerce », les Élus généraux ordonnent que la communication de Toulon à Autun se fera par La Boulaye, Saint-Eugène, La Chapelle-sous-Uchon et Mesvres, « sauf à déterminer si elle continuera par Montjeu ou par Montdru et Brion. » [Délibération du 18 janvier 1762]

Presque immédiatement, des travaux sont ordonnés au pont de Mesvres (sur le Mesvrin), déjà réparé en 1691 et 1731 [A.D.C.O. C 4108-4109]. Selon un devis approuvé le 7 janvier 1762, une soumission est passée avec l’entrepreneur Dufourneau, de Montcenis, « pour réparations urgentes à faire au pont de Maivres moyènant la somme de 1092 livres. »

Il faut attendre un an encore pour affiner le tracé du nouveau chemin et occasionner « moins de dépenses, moins d’ouvrages par corvées, des pentes moins rapides […] par Montjeu, Mesvres, la Chapelle, la Tanière, St Eugène et Toulon. » En conséquence, par délibération du 4 janvier 1763, les Élus généraux arrêtent ce tracé, demandent au Commissaire des Chemins de « nommer un directeur intelligent pour diriger le travail des communautés, parmi lesquelles on comprendra la ville d’Autun. » Les « escarpements de roches » à traiter sont évalués à 2000 livres. A noter qu’à cette époque, on considère ce chemin commun sur une lieue avec celui de Montcenis. En effet, la liaison routière avec cette ville se branche sur le deuxième lacet (en montant) de la route de Montjeu : c’est l’actuel « chemin des chèvres » ; mais il faudra attendre 1788 pour voir achevée la continuité de cette route vers Marmagne par le Pont d’Ajoux (D 237).

 

    

    Le pont de Mesvres

 

4.3 Requête de la Présidente Bouhier et second mémoire de Gauthey (2 juillet 1763)

 

À une date non précisée dans le dossier, mais que l’on peut situer au cours du premier semestre 1763, la Présidente Claude Marie Bouhier, « relicte de M. Jean Bouhier, Président à mortier au Parlement de Bourgogne », adresse une requête aux Élus généraux au sujet du nouveau chemin qui doit traverser ses propriétés sur le plateau de Montjeu (La Chaume). Il s’agissait d’une dépendance de Riveau : de la mouvance de Montjeu au 16e siècle, cette terre avait été divisée au début du 17e siècle ; au milieu du 18e siècle, elle appartenait au chanoine Joseph de Bar, qui l’avait léguée en 1752 à son neveu Jean Bouhier [Archives de la société Éduenne M 53]. La valeur des terrains traversés est estimée à 427 livres et le tort est évalué à 222 livres. Madame Bouhier insiste auprès des Élus pour que l’itinéraire soit détourné par Montdru et Runchy, soit par le pied de la montagne de Guenand. Le mémoire de Gauthey, appuyé cette fois par la signature de son supérieur hiérarchique Dumorey, présente deux types d’arguments.

 

A. Arguments financiers. 1. L’itinéraire par le pied des collines, qui réclame des ponts à cause des ravins, engage des travaux évalués à 10 000 livres, contre 2 300 livres pour celui de Montjeu qui n’exige que des aqueducs pour les sources. Le tort fait aux particuliers atteint 1 866 livres pour le premier cas, contre 1 480 livres pour le second. En outre, alors que les sols arides de la montagne sont peu cultivés, les terres des bas de pente « engraissées par le limon » sont jugées d’un meilleur rapport.

2. « La ville d’Autun, persuadée de l’utilité du chemin par Montjeu […] et qu’il en coûteroit réellement moins que de faire travailler les habitants a corvée, a pris une délibération le 30 janvier dernier pour demander à M. l’Intendant qu’il lui fut permis de faire une imposition pour faire faire la tache à prix d’argent, ce qui lui a été accordé. »

 

B. Arguments techniques. 1. Élargir les anciens chemins, notamment les « rues creuses », coûte aussi cher en corvée et ouvrages qu’un chemin neuf. Les chemins par les montagnes n’occasionnent aucun surcoût en l’absence de « rochers vifs » et il n’y a pas de levées à prévoir. Le chemin par Montdru et Étang est trop sujet aux ravinements et inondations, alors que « jamais chemin dans les montagnes ne sera moins sujet aux ravines que celui de Montjeu parce que l’ancien chemin qui est creux et qui reste toujours placé au-dessus du nouveau servira de canal. »

2. La route d’Autun à Toulon par Mesvres est réellement plus courte que par Étang, « quoi qu’il y ait plus de montagnes et les voitures y mettront toujours moins de temps. »

3. « Il y a plus de 4 communautés qui seroient employées entre St Eugène et la Tannière et qui n’auroyent pu venir travailler sur le chemin d’Étang parce qu’elles se trouvoyent trop éloignées. »

4. Le pont de Mesvres est fait et « peut subsister longtemps » ; le pont d’Étang [sur le Mesvrin] est ruiné : un nouveau pont coûterait 40 000 livres, auquel il faudrait ajouter une levée d’une demi-lieue.

5. Le chemin de Montjeu formera un tronc commun pour celui de Montcenis, ce dernier « étant un des plus utiles qui reste à faire […] et même le seul qui seroit ordonné par la suitte. »

Les choses semblent pouvoir en rester là tandis que s’amorcent les premières opérations sur le terrain. Une délibération des Élus généraux nous apprend que la plantation des piquets fixant le tracé définitif s’effectue à compter du 15 avril 1763. Une autre délibération du 17 novembre 1763 présente une requête au Conseil du Roi afin que soit autorisé l’abattage d’une partie de la forêt royale appelée « Forêt Sacrée » (Bois de Riveau) que doit traverser la route de Montjeu.

 

4.4 Supplique des habitants d’Étang-sur-Arroux (28 novembre 1763)

 

La fin de l’année 1763 est marquée par la requête adressée aux Élus généraux par les habitants de la communauté d’Étang. Sentant que l’itinéraire d’Autun à Toulon leur échappe, ils réclament la réparation du pont de la Perrière « vis-à-vis la Goulaine » qui « menace d’une chute prochaine », ainsi que celle du pont de Breuillet [Brouillet] sur le Mesvrin, qui « menace aussy ruine », et si étroit que « des bestiaux en sont tombés ». Isolés entre ces deux passages délicats, ils redoutent de ne plus pouvoir « débitter leurs denrées ».

 

 

5. NOUVELLE OPPOSITION AU PROJET ET MÉMOIRE DE DUMOREY

 

5.1 Mémoire présenté à la Chambre de la Noblesse

 

En 1763, les États généraux se sont réunis à Autun sous la présidence du prince de Condé, gouverneur de la Bourgogne, et il y fut beaucoup débattu de questions routières [G. Dumay, 1879]. À cette occasion est présenté un mémoire attribué à un certain sieur Roland, chargé des affaires autunoises de Madame Bouhier, destiné aux Élus généraux, « pour faire vérifier les faits articulés dans ce mémoire et être envoyé en conséquence à un commissaire autre qu’un ingénieur de la province. »

Le Bureau des Ponts et Chaussées prit cela pour une indélicatesse à son égard et détermina Dumorey, chef du service, à produire un long mémoire de 52 pages : « C’est avec une extrême douleur, écrit-il en préambule, que ces ingénieurs voyent qu’après quinze ans de service […] ils sont dénoncés dans une assemblée comme des prévaricateurs. » Quoi qu’il en soit des intentions réelles ou supposées de l’auteur du mémoire, une copie de ce dernier, jointe au mémoire que Dumorey adresse aux Élus généraux, est malheureusement absente du dossier des Archives, de telle sorte que la seule connaissance que nous en ayons est sa réfutation par l’ingénieur en chef.

 

5.2 Le mémoire de Dumorey (10 août 1764)

         

D’emblée, l’ingénieur juge sévèrement l’auteur du mémoire : « Si enfin outre les erreurs que l’ignorance de la matière a produitte, où se trouvent des preuves évidentes de la mauvaise foy de l’auteur de ce mémoire, la confusion retombera sur luy et M. de Varenne [Commissaire aux Chemins] aura le regret de s’être laissé séduire le premier. » En effet, Dumorey estime que ce mémoire est écrit avec tant d’assurance « qu’il en a imposé à M. de Varenne jusqu’au point de luy faire dire à la Chambre de la Noblesse que le sieur Gauthey avait abusé la confiance des Élus. »

Dumorey affirme être allé lui-même reconnaître les lieux et annonce des plans joints au mémoire (non conservés). Puis, après avoir exposé les étapes du projet depuis le rapport de Le Jolivet jusqu’aux deux mémoires de Gauthey, Dumorey dresse un catalogue de ce qu’il considère comme les « contrevérités » du mémoire attribué au sieur Roland.

1° Un chemin qui passe sur des sommets arides causerait plus de pertes que celui qui côtoie les rivières et traverse des terres fertiles descendant de la montagne et engraissées par les inondations : objection déjà rejetée dans le mémoire du 2 juillet 1763. La question des « rues creuses » est développée, notamment celles de Montdru : « Lorsqu’il s’agit de construire un chemin neuf on les évite toujours en passant à côté parce qu’il y a moins d’ouvrages à faire et que le chemin est plus solide. […] Ce n’est pas un chemin creux de 40 toises ny une motte de terre à abattre qui rendent la montée de Montdrû difficile […] il n’est pas aisé de former des palliers pour se développer en faisant des retours. » [Comme on le fera pour les lacets de Montjeu].

2° Il y aurait plus de ponts et de glaces sur les sommets que dans les vallons. Les ponts par Étang sont traités de « pontins » : au contraire, c’est la route de Montjeu qui ne nécessitera que des aqueducs. Une grande partie du mémoire est d’ailleurs consacrée aux ouvrages d’art nécessaires pour chaque itinéraire, détail qui offre pour nous l’intérêt d’un panorama topographique des lieux à l’époque (étangs, marais, ancien chemin).

3° Les chemins de coteaux seraient plus dispendieux à cause des remblais : en fait, ce sont les plaines qui nécessitent des chaussées construites avec des terres rapportées, ce qui occasionne dix fois plus de travail. Les débordements de l’Arroux à Étang seraient dus à une île à détruire et qui pourrait servir à construire une levée : « Choses absurdes et impraticables », « projet ridicule » selon Dumorey. Quant à détourner le chemin pour éviter les zones inondables, il n’y faut pas songer : « Ces détours pourroient coûter plus cher que les levées qu’on épargnerait. » C’est le cas de la levée du Péage de Laizy opposée à un coteau « rempli de rochers vifs ». La grande levée d’Étang (90 toises) n’est pas la seule à construire ; deux autres de 50 toises à Saint-Eugène et de 30 toises à l’étang du Mas (Dettey) sont nécessaires, sans compter la traversée du « bourbier de la Boulaye », marécage de 800 toises de longueur.

4° Le chemin actuel par Étang serait plus praticable que celui par Mesvres à cause des pentes trop rapides : mais ces pentes seront justement adoucies par le tracé de la nouvelle route. « Pour bien en juger, […] on doit comparer ces deux routtes, non dans l’état où elles sont a présent mais dans l’état où elles seroient si elles étaient construites. » Dumorey note qu’on a trouvé le moyen d’adoucir les pentes (5 pouces par toise) « sur lesquelles on peut galoper à cheval ». Mais il admet que les sinuosités nécessaires pour cet adoucissement allonge le chemin par Mesvres, « et c’est pour cette raison qu’il n’a que 450 toises de moins que celuy par Étang. » On peut encore diminuer la pente en réduisant la largeur à 28 pieds, « suffisante pour le commerce qui se fait ou qui peut s’établir dans ce pays. »

 

En conclusion, « MM. Les Élus sont très instamment suppliés de vouloir bien faire parvenir la vérité sous les yeux de MM. de la Noblesse afin que cette respectable assemblée rende aux ingénieurs de Bourgogne la justice qu’elle croira leur être düe, et la confiance qu’ils ne cesseront jamais de s’efforcer de mériter. »

La démonstration énergique de Dumorey trouve apparemment un écho favorable auprès des Élus généraux qui prennent dès le 10 septembre 1764 une délibération dans le sens souhaité par l’ingénieur : le tracé par Montjeu et Mesvres est confirmé, considérant qu’il sera plus sûr car non inondable, plus utile au commerce en desservant un grand nombre de villages, moins préjudiciable en traversant des terres moins fertiles, enfin qu’il offre des communautés plus nombreuses et plus proches pour y travailler. Les Élus ordonnent en outre que la largeur de la chaussée soit de 20 pieds entre les fossés, et que soit construits des « cassis » au lieu de ponts, autant que possible.

En outre, l’alignement du chemin sur le plateau de Montjeu tendant à réduire la surface de l’étang de la Chaume, pour éviter de traverser le pré situé en contrebas, Madame Bouhier s’engage à entretenir la chaussée de cet étang après sa remise en état (Délibération du 28 décembre 1765).

 

   

    AUTUN. Lacet de la route de Montjeu et embranchement de l'ancien

    chemin de Montcenis

 

6. LES TRAVAUX

 

6.1 Réparation du pont de Brouillet (1764)

 

La supplique des habitants d’Étang n’est pas restée vaine : les Élus généraux, prévoyant que l’itinéraire par Mesvres tarderait à être mis en service, se décident à sécuriser le pont sur le Mesvrin, proche du confluent avec l’Arroux qui en rend les crues redoutables, ainsi que le pont « vis-à-vis la Goulaine », entre Brion et Étang. Le 4 janvier 1764 les travaux de réparation du premier et la reconstruction du second sont adjugés à Nicolas Machureau, entrepreneur à Semarey, moyennant 363 livres 7 sols. Le 21 août 1764, les ouvrages sont reconnus par Dumorey, « exécutés conformément au devis », avec une augmentation « ordonnée verballement » de 45 livres.

 

6.2 Corvées et travaux divers

 

A la fin de l’année 1765, les travaux doivent être ralentis par pénurie de main-d’œuvre disponible : une délibération du 27 décembre arrête que la route ne sera ouverte que d’Autun jusqu’aux Trois Croix [ ?] « attendû que les communautés qui doivent travailler au-delà sont employés sur la route de Toulon à Digoin. » Toutefois, celles de Charmoy et Saint-Nizier-les-Charmoy [Les Bizots], bien qu’éloignées de la route d’Autun à Toulon, sont appelées en renfort « attendû qu’elles ne sont employées sur aucune route. » [Elles le seront au cours de la décennie suivante sur les routes de Montcenis et de Chalon à Toulon]

Autre délibération relative à la corvée : elle concerne le paiement de 1 010 livres à Denis Aubry, concierge à Toulongeon, « pour le prix des outils qu’il a fait faire. » Le même Aubry s’engage à exécuter divers ouvrages (terrassements) par soumission du 10 juin 1767, conformément au devis dressé par Gauthey et s’élevant à 561 livres.

Enfin, Bernard de Chanteau, nouveau Commissaire aux Chemins, ordonne le paiement d’une somme de 1 113 livres 15 sols au sieur Guenot pour le rétablissement des tuyaux de la fontaine Saint-Blaise : en effet, les conduites avaient été mises à mal lors du tracé de la nouvelle route, « dans l’emplacement de l’ancien chemin », avec une pente réduite.

La carte dressée en 1789 présentant l’état du réseau routier bourguignon montre que la chaussée présente deux revêtements différents qui partagent l’itinéraire en deux parties de longueurs équivalentes : première moitié (entre Autun et Aizy) en pierre concassée ; seconde partie (jusqu’à Toulon) revêtue de sable et de gravier. [A.D.C.O. 3861 bis]

 

7. LES TRACÉS

 

7.1 Route d’Autun à Toulon par Mesvres.

 

Le nouveau chemin illustre bien l’esprit du « siècle des routes » consistant, notamment pour gravir les pentes excessives, à établir des séries de lacets parfois serrés, comme les « rampes de Montjeu », les virages de Runchy et du col de La Chapelle-sous-Uchon. Il s’agit d’une application directe du Traité de la construction des chemins (1693), premier ouvrage technique spécifique aux travaux routiers, dont l’auteur Hubert Gauthier était ingénieur des chemins du Languedoc. Mais l’examen de la carte de Seguin (1763), le témoignage des curés sollicités pour l’enquête préalable à l’établissement de la carte de Cassini [A.D.C.O. C 3530], l’étude des terriers locaux montrent que la route du 18e siècle reste généralement assez proche du tracé de chemins antérieurs.

Parmi les sections de chemins antérieurs à la route du 18e siècle, on peut signaler quelques exemples. Le terrier de Toulongeon (1773) distingue l’ancien chemin de Mesvres à La Chapelle par le lieu-dit « le Brechet » et la ferme des « Gaudeaux », et la nouvelle route ; de même entre le « nouveau grand chemin d’Autun à Toulon » et  « le chemin ancien de Mesvres et de la Chapelle à la Tanière et à Toulon qui passait aux Roulots et à Villeclerc »  [Vilclair]. Le cadastre napoléonien de La Tagnière (1830) atteste que l’ancien chemin de ce bourg à Saint-Eugène passait par Montmenème, le mont Rouge, Le Mast et Corcelles, tandis que la route du 18e siècle se détourne par le Guide de Dettey et contourne la montagne de la Chaîne.

Pour l’essentiel, la route du 18e siècle est reprise par la voirie départementale actuelle. Une seule section sera abandonnée au siècle suivant : le passage dans la gorge de Chaumont, à La Tagnière, auquel est substitué un tracé à flanc du mont Ségaud (D 224), l’un et l’autre se rejoignant au sud de Montmenème (La « vieille route » désaffectée s’est maintenue comme chemin rural).

D’abord nommée Route n° 10 dans le classement de 1813, puis route royale de 1815 à 1848, elle ne sera plus qu’une succession de Chemins de Grande Communication et de Chemins d’Intérêt Commun après le tracé de la nouvelle route d’Étang à Toulon par La Boulaye (actuelle D 994) au milieu du 19e siècle. Ce déclassement apparaît à travers son fractionnement dans le réseau actuel : D 256 et D 46 jusqu’à Mesvres ; D 228 et D 256 jusqu’à La Tagnière ; D 224 et D 240 jusqu’à Toulon.

 

 

  LA TAGNIERE. La route du 18e siècle dans la gorge de Chaumont

 

7.2 Route d’Autun à Toulon par Étang-sur-Arroux

 

La voirie moderne d’Autun à Toulon par la vallée de l’Arroux se compose de deux sections routières : 1° Les D 46 et D 122 entre Autun et Brion, puis une voie vicinale jusqu’à Étang, qui reprennent partiellement le tracé de l’ancien chemin par Brion. 2° La section d’Étang à Toulon qui devra attendre la décennie 1840-1850 pour être réalisée, devenant ainsi la R.D. n° 10 (substituée à l’itinéraire 7.1), puis le Chemin de Grande Communication n° 70 qui se poursuit vers le Charolais. Ainsi, le projet d’un axe Saulieu-Autun-Charolles-La Clayette par l’ingénieur Gauthey est parvenu tardivement à son terme. Le tronçon Autun-Toulon sera même intégré au réseau national après 1945 avec son prolongement vers Digoin et Marcigny : l’ancienne N 494 est devenue aujourd’hui la D 994.

La nouvelle route, autrefois doublée par la voie ferrée Autun-Digoin sur certaines sections, ne reprend le tracé de l’ancien chemin que sur de courtes sections : d’Étang au Vernois ; à La Boulaye, entre Plaige et La Sourdelle ; enfin du Gourmandoux à Toulon.  

Entre le moulin de la Planche et Le Rivet, la route moderne se démarque complètement de l’ancien chemin qui survit par quelques lambeaux de dessertes alternant avec des limites parcellaires, servant parfois d’appui aux limites communales. Il est aussi intéressant de noter qu’entre La Boulaye et Toulon, la route actuelle et les anciens chemins issus de Charbonnat, du château de La Boulaye et de Mesvres se rapprochent peu à peu jusqu’à fusionner au goulet du Gourmandoux, passage encaissé de l’Arroux contrôlé par l’ancienne maison-forte de la Roche Bazot dont les vestiges subsistent au bord de la rivière.

 

* * *

 

Chacun de ces deux itinéraires constitue une approche différente et complémentaire de la vallée de l’Arroux. L’un en plaine, à distance de la rivière qui se cache derrière les beaux arbres de ses prairies parsemées de grandes fermes ou de manoirs du 19e siècle, ou qui révèle le charme de ses berges, jadis chantées par Hamerton, en s’approchant des villages de Charbonnat, de Saint-Nizier et de La Boulaye : route aux horizons limités d’un côté par les monts du Morvan, de l’autre par les puissants môles de Montjeu et d’Uchon, et leur « satellite », la colline de Dettey, toute dévouée au « bon Saint-Martin », comme en écho à la silhouette débonnaire et trapue du mont Beuvray qui lui fait face. L’autre route, son antithèse, demeure l’une des plus belles de l’Autunois, par l’ampleur de ses horizons et par la variété des paysages traversés : des sévères forêts de Montjeu au bocage paisible de la vallée du Mesvrin, des landes rocailleuses du piémont d’Uchon au vallon de l’Épontin, déjà ouvert aux bassins industriels de Montceau et de Gueugnon, elle traverse un pays animé de villages pittoresques au patrimoine insoupçonné par le passant furtif, Mesvres, La Chapelle, La Tagnière, Dettey et Saint-Eugène.

 

 

Sources

 

Archives départementales de Côte-d’Or [A.D.C.O.] Etats du duché de Bourgogne : Ponts et Chaussées : route n° 16 : C 4110 (1767-1772) - États du duché de Bourgogne : Cartes de la province : registre de transcription des lettres des curés pour établir la carte de Cassini : C 3530 (1757)

 

Archives de la Société Éduenne : terrier de Toulongeon (1773) – Roidot-Deléage et Roidot-Errard, Notes et dessins manuscrits sur les voies romaines - Ch. Boëll. Autun. Notes et documents. [M 53]

 

Archives de l’Académie François Bourdon : terrier de La Boulaye (1533)

 

 

Bibliographie

 

CHARMASSE DE A. La Maison-Dieu des Quatre Frères. Mémoires de la Société Éduenne d’Autun, tome 30, 1902, p. 69-83.

COSTE A. et al. Un ingénieur des Lumières Émiland-Marie Gauthey. Presses de l’École Nationale des Ponts et Chaussées, 1994.

DE SAINT-JACOB P. Le réseau routier bourguignon au XVIIIsiècle. Annales de Bourgogne, 1956, p. 257.

DE SAINT-JACOB P. Les paysans de la Bourgogne du nord à la fin de l’Ancien Régime. Les Belles Lettres, 1960. Réed. B.H.R. et E.U.B. ,1995

DUMAY G. Une session des États de Bourgogne à Autun en 1763. Mémoires de la Société Éduenne, 1879, tome 8, p. 1-88

LAHAYE P. Le vieux chemin de Digoin à Toulon par la vallée de l’Arroux. Échos du passé, n° 37, 1997, p. 17-33.

MAERTEN M. Prospections, rapport 1991, S.R.A. Dijon, p. 15.

MESQUI J. Chemins et ponts. R.E.M.P.A.R.T. 1994. [Introduction à l’histoire des routes]

NIAUX R. Promenades archéologico-routières autour du hameau de Charmasse. Histoire et Nature de l’Autunois, 2000.

NOTET J.C. La grande voie romaine du val d’Arroux au sud de Gueugnon. La Physiophile, n° 144, juin 2006, p. 29-34.

REBOURG A. (dir.) Carte archéologique de la Gaule, Saône-et-Loire. Ministère de la Culture, 1994.

THEVENOT E. Les voies romaines de la Cité des Éduens. Latomus, 1969.

 

                                                    

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